jeudi 30 octobre 2014

Ce corps mortel : NOTRE CORPS, UNE TENTE

Notre corps, une tente



Lectures : Livre du prophète Esaïe, chapitre 38, versets 12 à 13 (BFC)
            Seconde épître de Paul aux Corinthiens, du chapitre 4, verset 16 au chapitre 5, verset 5
            Évangile selon Jean, chapitre 1, versets 14 à 18 (BFC)

            Il y a bien des années, j'ai fait un voyage dans le Sud de l'Algérie. C'est là que commencent les dunes de sable, qu'on voit les premières oasis avec leurs palmiers dattiers, que l'on fait faire aux touristes leur premier tour à dos de dromadaire. C'est là que j'ai découvert, pour la première fois, plantée au milieu des sables, une tente de bergers nomades.

            Je pense que cette habitation-là ressemblait beaucoup plus à ces tentes dont nous parle la Bible qu'à celles qu'on déploie dans nos campings modernes. Mais c'est une belle comparaison qu'utilise la Parole de Dieu comme image de notre corps, cette enveloppe, cet étui, qui tient la partie spirituelle de notre être. Et Ezéchias, ce roi d'Israël qui, malade, a vu la mort de près, s'est exprimé ainsi : "L'abri où je vis va être arraché et emporté loin de moi, comme une tente de berger" (Es. 38. 12).

Notre corps, une tente. De cette métaphore, nous avons au moins trois leçons à tirer. Tout d'abord, nous retenons sa fragilité. Quelques pieux, quelques cordages, quelques morceaux de toile ou de peaux, c'est ainsi que sont faites les tentes du désert. Cela paraît bien peu de choses pour supporter les siroccos et les tempêtes de sable. Pourtant, cela résiste soixante, soixante-dix, voire quatre-vingts ans…

C'est dans sa seconde épitre aux Corinthiens, que l'apôtre Paul souligne le plus l'aspect de fragilité de notre corps. Déjà au chapitre 4, il dit que le trésor de l'Evangile, il le porte dans un récipient d'argile (4. 7). Dans d'autres passages, il mentionne sa faiblesse et il décrit toutes les circonstances difficiles qu'il a traversées. Il arrive à témoigner même qu'il se complaît dans les faiblesses, "car, dit-il, quand je suis faible, c'est alors que je suis fort" (12. 10). Oui, mais parce qu'il sait que la puissance du Seigneur s'accomplit dans cette faiblesse (cf. v. 9). Aussi, bien qu'accablé, vit-il de la grâce, de la bonté de Dieu, de son secours, de son amour. Dans le passage que nous avons lu tout à l'heure, il compare aussi son corps à une tente. Une tente, pas un mobil home ! Par deux fois il évoque les soupirs qui s'échappent de son cœur. Il ressent une oppression. Même, de manière réaliste, il envisage, sa disparition.

Marguerite et moi, nous disons chaque jour merci au Seigneur, pour nos enfants, nos petits-enfants, nos proches, pour vous nos frères et sœurs, et surtout de ce que nous sommes encore là tous les deux. Nous savons pourtant que notre corps, en attendant la résurrection, est "semé corruptible… méprisable… et dans la faiblesse", comme le dit l'Ecriture (I Cor. 15. 42-43). En fait nous tous, nous connaissons beaucoup de maux, parfois minimes, parfois plus douloureux et plus longs. Et puis, pour reprendre notre image, les cordages de notre tente se détendent, ses piquets commencent à branler, ses toiles à trembler, au vent de l'existence. Et nous, chrétiens, nous n'y échappons pas.

Oui, nos corps sont fragiles, souvenons-nous-en. Assurons-nous donc d'avoir du plus solide, comme nous l'avons lu tout à l'heure : "Nous savons, comme écrit l'apôtre, que si cette tente où nous habitons sur la terre est détruite, nous possédons dans le ciel une construction qui est l'œuvre  de Dieu" (II Cor. 5. 1).

Et il ajoute : "une demeure éternelle". Et de cette pensée, par contraste, nous tirons un deuxième enseignement : notre corps aujourd'hui, comme une tente, a un caractère provisoire, périssable, temporaire. Dieu, après avoir créé l'homme, l'a vu obéir à la voix du séducteur. Il lui a dit : "C'est à la sueur de ton front que tu gagneras ton pain jusqu'à ce que tu retournes à la terre d'où tu as été tiré. Car tu es poussière et tu retourneras à la poussière" (Gen. 3 19).

La vie est courte, mais qu'est-ce qu'on ne fait pas pour essayer de la prolonger, pour se maintenir jeunes ! Qu'est-ce qu'on ne dépense pas en crèmes et en cosmétiques de tous genres, en produit anti-rides, anti-âge, rajeunissants, revitalisants, reliftants ! Après tout, si cela permet à quelqu'un d'être bien dans sa peau, tant mieux ! Bien sûr, le Seigneur veut que nous prenions soin de notre corps, comme de tout ce qu'il a créé. Mais rappelons-nous que, jusqu'à sa venue, nous vivons dans des "corps mortels" (Rom. 8. 11).

On dit que les Touaregs, ces nomades du désert, se sédentarisent de plus en plus. Sont-ils poussés par l'avancée du désert ou veulent-ils vivre d'une autre manière ? Peut-être les deux. Quant à nous, sachant que les matériaux d'une tente ne sont pas faits pour la durée, il serait temps de nous préoccuper d'un autre avenir, d'une construction plus solide, plus durable. Nous passons beaucoup de temps pour des choses éphémères, pour des valeurs précaires. Nous nous occupons beaucoup trop des choses d'en bas et nous oublions de "rechercher celles d'en haut, où Christ est assis à la droite de Dieu" (Col. 3. 1). Si nous nous investissions davantage dans ce qui dure, nos vies seraient encore plus belles et notre témoignage plus percutant.

Une tente est facilement transportable. Avec elle, on peut faire de l'itinérance. C'est le dernier enseignement que je relève. Nous ne sommes que des voyageurs sur cette terre, des gens de passage, des migrants, des nomades. Comme Abraham, qui a voulu délibérément habiter sous des tentes, "car il attendait la ville qui a de solides fondations, celle dont Dieu est l'architecte et le constructeur" (Héb. 11. 9-10), la cité céleste.

Nous, nous allons bientôt déplacer notre tente pour l'implanter dans la Drôme. Plus tard, nous ferons un autre voyage. Ce sera le dernier et nous abandonnerons cette tente fragile, provisoire et transportable. Pourquoi ne pas en parler ? Un jour je visitais une paroissienne qui venait de perdre son mari. Elle m'avait demandé de présider aux obsèques. Je lui demandai :    "Vous êtes-vous entretenue une fois avec votre époux de l'éventualité de ce départ ? – Non, jamais", m'a-t-elle répondu. Et ces mots m'ont fortement impressionné. Pourquoi la mort est-elle si souvent un sujet tabou ? Pourquoi évitons-nous de nous en entretenir ?

Nous avons beaucoup à apprendre de l'attitude de l'apôtre Pierre à cet égard. Voici ce qu'il écrit : "Je regarde comme un devoir, aussi longtemps que je suis dans cette tente, de vous tenir en éveil par des avertissements, car je sais que je la quitterai subitement, ainsi que notre Seigneur Jésus-Christ me l'a fait connaître" (II Pi. 1. 13-14). Malgré l'annonce de son martyre, il attire notre attention sur la fin de notre existence terrestre. Il peut parler de sa mort sans peur et sans regret, et d'une manière merveilleuse.

 En effet, il la désigne par le mot départ, littéralement "sortie". Parce qu'il va sortir de ce monde pour entrer dans le royaume éternel. Pour lui, ce sera beau de contempler le Seigneur au ciel, à la place qu'il est allé lui préparer. Quelle douce sérénité pour celui qui, comme lui, a mis sa confiance en Jésus-Christ, son Sauveur. Pierre sait que Jésus est mort pour lui et qu'il sera présent à son dernier soupir.

Mais sa préoccupation majeure, ce n'est pas qu'on parle de lui, qu'on élève des statues ou des basiliques à son nom. Son seul souci et son vif désir, c'est que les chrétiens ne s'endorment pas. C'est qu'ils entendent ses exhortations. "Je regarde comme un devoir, écrit-il, aussi longtemps que je suis dans cette tente, de vous tenir en éveil par des avertissements…" (v. 13).

            Et moi, chers amis, je voudrais vous dire : Ne pensez pas d'abord à nous. Souvenez-vous de Jésus-Christ ! En vérité, le Christ, la Parole éternelle, le Verbe tout-puissant, Fils éternel de Dieu, a pris un corps d'homme pour habiter parmi nous. Le texte que nous avons lu tout à l'heure dit littéralement : "il a dressé sa tente parmi nous" (Jn 1. 14). Il savait bien que son corps, cette tente, qu'il avait prise pour servir son Père et faire sa volonté, lui serait un jour violemment arrachée. Lorsqu'il serait élevé sur la colline de Golgotha. En mourant sur la croix, Jésus a détruit le pouvoir de la mort, cette reine des épouvantes. La mort de Jésus, c'est votre vie, sa résurrection, le gage de votre résurrection avec un  corps semblable au sien relevé de la mort.

Tout ce que le Seigneur a vécu, tout ce qu'il a souffert, c'est pour vous, pour que vous puissiez envisager votre départ dans la paix et la sérénité. Il ne vous abandonnera jamais. Un jour, il vous recevra dans ses "palais d'ivoire" merveilleux (cf. Ps. 45. 9).

            Marguerite a eu un oncle qu'elle n'a jamais connu. Sergent-major à la guerre de 14-18. Il faisait partie de ceux qu'on appelle les Poilus et, comme beaucoup, il est tombé au champ d'honneur. Il avait 22 ans. En préparant notre déménagement, nous avons retrouvé la correspondance qu'il envoyait du front.  Alors qu'il était dans les tranchées, couvert de boue, sous le tonnerre des obus et à côté de camarades blessés, enjambant ou emportant le corps de ses camarades tués, voici ce qu'il écrivait à ses parents, quelques jours  avant sa mort : "Que Dieu permette notre revoir ici-bas,   et le plus vite possible ! Notre séparation n'a déjà que trop duré, et si, de part et d'autre, nous l'avons aussi vaillamment subie, c'est que Dieu, que nous implorons tous les jours, nous a donné les forces nécessaires. Continuons à l'invoquer fermement…"

Il ajoutait : "Et si l'avenir nous réservait encore des épreuves, sachons vaillamment les supporter, et donnons-nous rendez-vous dans la Patrie Céleste et dans la félicité éternelle."

C'est là aussi, chers amis, le rendez-vous que nous vous donnons.

Dernière prédication  a Salon-de-Provence

                        

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